Le hublot de l’avion ne montre qu’un moutonnement blanc qui, abolissant toute notion d’espace, me place dans un no man’s land et suspend le temps. Je repense à ces derniers jours..
Après le départ de Maxime, une
sensation pénible s’est installée entre Emily et moi. Après avoir essayé de me
consoler, ma petite-fille s’est vite éclipsée. J’étais profondément peinée, je
ne la comprenais plus. Son manque de tact vis-à-vis de Maxime me surprenait. N’est-elle
pas foncièrement différente des autres ?
Le lendemain, j’ai voulu en
avoir le cœur net. Je l’ai appelée.
« Emily, ma chérie, j’ai
été surprise par ton attitude hier. Qu’est-ce qui se passe ?
- Je suis désolée, grand-mère. Je crois que j’ai réagi ainsi parce que je t’aime
très fort, plus que tous les autres membres de la famille, plus même que papa.
Je crois que j’ai peur pour toi, peur que tu souffres, peur que cette relation
ne soit qu’une illusion. J’ai eu du mal à accepter qu’un homme plus jeune
puisse être réellement amoureux d’une femme plus âgée. Moi aussi j’ai aussi des préjugés. J’ai peut-être même éprouvé un peu de
jalousie car c’est vrai qu’il est beau et attirant Maxime. Il a un magnétisme
animal qui m’a troublée dès que je l’ai vu. Pardonne-moi.
- Je ne t’en veux pas. D’autant
que tu ne sais pas tout à son sujet. Maxime n’est pas bien portant mais je ne t’en
dirai pas plus, sans qu’il ne m’y autorise.
- Grand-mère, dis-lui que je
regrette vraiment d’avoir été cassante et que je ne demande pas mieux que de le
connaître et de repartir sur de nouvelles bases.
- Merci, ma chérie. Je te
laisse. Je vais lui parler. Je t’embrasse.
- Gros bisous, grand-mère. »
J’ai alors appelé Maxime, sans
obtenir de réponse. Régulièrement, je composais son numéro, en vain. En fin de
journée, je suis allée à son domicile pour y trouver porte close.
Le jour suivant, j’ai
recommencé appels et visites, sans plus
de succès.
Rentrée à la maison, inquiète, j’ai appelé les hôpitaux, les uns après les autres. C’est au quatrième qu’on m’a confirmé que Maxime avait bien été admis aux urgences et tranféré en neurologie.
Entrant dans sa chambre, je l’ai
trouvé relié à des baxters. Les chambres d’hôpital me donnent toutes
cette impression de blancheur aseptisée, comme si j'étais déjà dans un sas
entre le monde des vivants et l’autre. Il m'a souri.
« Je me disais bien que je
te verrais pousser cette porte, Line. Tu es si résolue qu’aucun obstacle ne te
résiste. Tu vois, je reprends du poil de la bête. Je devrais pouvoir sortir
dans quelques jours.
- Comment t’es-tu retrouvé ici ?
Que s’est-il passé ?
- Quand je t’ai quittée, je me
sentais mal tant physiquement que moralement. Je suis allé boire. C’est idiot
mais j’avais besoin de ne plus rien sentir. J’ai bu… trop. Je ne sais plus
comment je suis rentré. Mais au matin la douleur était tellement forte que j’ai dû appeler le samu qui m’a transporté ici.
- Et que disent les médecins ?
- Que veux-tu qu’ils disent ?
Ce sont des docteurs pas des magiciens. La maladie évolue, un peu plus vite que
prévu. Mais des accalmies peuvent toujours se produire. Un jour ou l’autre ce
sera la chaise roulante.
- Dis-moi, Maxime, quel pays aimerais-tu
visiter ?
- Pourquoi cette question ?
- Parce que, dès que tu
quittes cet hôpital, nous partons tous les deux. »
C’est ainsi que nous nous
trouvons dans cet avion qui nous amène au Caire. En guise de clin d’œil pour notre séjour dans
la capitale égyptienne, j’ai réservé une chambre au Royal "Maxim" Palace Kempinski.
Le hall est gigantesque tout en blanc et or. Je sais c’est un peu bling bling !
Mais voir les yeux de Maxime briller comme ceux d’un enfant vaut bien la
dépense. Après quelques jours dans cette mégalopole, nous embarquerons sur un petit bateau de croisière Maxime me sourit. Il me semble en meilleure forme mais je m’inquiète
de son état. Surtout je ne dois rien en laisser paraître. Nous allons profiter
au maximum des moments qui nous sont donnés.
Bonjour José
RépondreSupprimerTon texte se lit avec facilité et j'ai envie de voir la suite.
Au travers du "blanc" qui est bien présent, c'est la PEUR qui transpire ensuite, tant chez Emily que chez Line, même peut-être chez Maxime. En second "moteur", je sens du désir : désir de vivre, de se plaire, avec un zest de jalousie chez sa petite-fille.
Où cela peut-il nous mener? Et si un second malaise avait lieu en Egypte? Ce n'est pas le dernier qui déciderait finir ses jours dans le désert...
Il est très à la mode ( voir trop??) d'être bi-sexuel et d'avoir une seconde vie en parallèle...Un coup de téléphone , de Paris, par exemple, et tout repart vers d'autres pistes!
merci et à bientôt.
Patrick
Bonjour José,
RépondreSupprimerCette lecture est un plaisir ; tout se tient.
Mais il faudra rentrer au bercail car j'aurai du mal de permettre à Line de retrouver un objet important pour elle alors qu'elle le croyait perdu. Quoique on oublie parfois des choses dans une valise qu'on croyait avoir complètement vidée... et surtout s'il y a longtemps qu'on ne l'a pas utilisée... Un petit billet doux ? Avec une adresse, un n° de téléphone ? Une clé ? Une Photo ? Une prescription médicale périmée ?
L'aventure continue. A bientôt ! Gisèle
Bonjour José,
RépondreSupprimerLes heures sont comptés pour Maxime.
Le séjour en Egypte est magique . En préparant sa valise il retrouve un vieux porte clef avec la lampe d'Aladin, il sourit. Il veut y croire et fait 3 vœux. Il est prêt à tout pour guérir. Sur le trajet ils rencontrent une guérisseuse qui lui vend des herbes qui d'après elle le guériront...
Texte fluide , belle continuité
Merci.
Nadera
Bonjour José,
RépondreSupprimerOuf ! On est soulagé ! Pas de rupture entre Line et Max, bien au contraire une échappée en amoureux. Sans compter la mise au clair avec Emily.
Ton texte alterne le récit à la première personne et les dialogues. Il est vivant, il sonne juste et, même si l’avenir est assez sombre pour Max- et la consigne qui t’attend n’arrange pas les choses ! – on partage le bonheur que ce couple sait s’accorder même dans un contexte difficile.
Deux détails.
En guise de clin d’œil pour notre séjour dans la capitale égyptienne, j’ai réservé une chambre au Royal Maxim Palace Kempinski.
En quoi le fait de réserver une chambre dans un hôtel de luxe constitue-t-il un « clin d’œil » ? Le clin d’œil marque une connivence moqueuse, une mise à distance, ce qui ne me semble pas être le cas. Ou alors, il faudrait préciser genre « En guise de clin d’œil au mauvais sort… »
« Mais voir les yeux de Maxime briller comme ceux d’un enfant… »
Les yeux d’un enfant ne brillent pas tout le temps, il faudrait un complément genre : « devant un nouveau jouet ».
Continue à nous émouvoir avec la belle histoire de Max et de Line, même si la consigne st dure puisque le sujet sera une amputation e, mais par ailleurs, tu as droit au vert de l’espoir… et aussi le droit de manipuler la consigne !
Bon travail,
Liliane